LOUSTALOT-VILLAGE en toute objectivité

LOUSTALOT-VILLAGE en toute objectivité

L'amalgame avec une loi obsolète et inadaptée et le problème de la copropriété horizontale toujours non résolu

Loi du 28 juin 1938 tendant à régler le statut de la

copropriété des immeubles divisés par appartements

(page 7578 du J.O.R.F.)

 

Chapitre I

(DISPOSITIONS RÉGISSANT LES SOCIÉTÉS DE CONSTRUCTION)

 

Article 1er

Sont valablement constituées sous les différentes formes reconnues par la loi, même si elles n’ont pas pour but de partager un bénéfice, les sociétés ayant pour objet soit la construction ou l’acquisition d’immeubles en vue de leur division par fractions destinées à être attribuées aux associés en propriété ou en jouissance soit la gestion et l’entretien de ces immeubles ainsi divisés.

 

Article 2

Un associé ne peut jamais prétendre l’attribution exclusive en propriété par voie de partage en nature, de la fraction d’immeuble pour laquelle il a vocation, non plus qu’à se maintenir dans la jouissance exclusive de cette fraction, s’il n’a rempli ses obligations et souscrit proportionnellement à ses engagements aux appels de fonds supplémentaires nécessités par la réalisation effective de l’objet social.

 

Article 3

Si un associé ne souscrit pas, proportionnellement à ses engagements, aux appels de fonds supplémentaires nécessités par la réalisation effectives de l’objet social, ou s’il ne remplit pas ses obligations, ses droits de toute nature dans l’actif social, y compris ceux afférents à la jouissance d’une fraction d’immeuble, pourront être, un mois après une sommation de payer ou d’exécuter restée sans effet, mis en vente publique à la requête des représentants de la société autorisée par une décision prise par les associés, possédant au moins les trois quart du capital social.
Cette mise en vente sera notifiée par lettre recommandée, avec accusé de réception, à l’associé défaillant ainsi qu’à tous les autres associés, et publiée dans un des journaux d’annonces légales du lieu du siège social.
Huit jours après l’envoi de ces lettre recommandées et cette publication, la vente pourra avoir lieu.
Il sera procédé, en une seule fois, pour le compte et aux risques de l’associé défaillant.

 

Article 4

Les dispositions des trois articles précédents s’appliquent aux sociétés antérieurement constituées dans le même but.

 

Article 4bis (créé par l'article 1er de la loi n° 24 du 4 février 1943)

En cas de dissolution de la société, l’assemblée générale peut désigner un ou plusieurs liquidateurs chargés de procéder au partage en nature et à l'attribution de fractions d’immeubles aux associés conformément à leur vocation.
Le projet de partage et d ’attribution dressé par le ou les liquidateurs doit être approuvé par l’assemblée générale statuant à la double majorité des deux tiers en nombre des associés et des deux tiers du capital social.
Celte décision est opposable aux associés non présents ou non représentés à l’assemblée ainsi qu’aux bénéficiaires* ou ayants droit de promesse d’attribution absents ou incapables.
Dans le cas où la succession d ’un associé décédé n ’est pas liquidée, les droits et charges propres au défunt sont attribués indivisément au nom de ses ayants droit et cette attribution n’entraîne pas de leur part acceptation de la succession, du legs ou de la donation.
À l’expiration d ’un délai d’un mois à compter de l’assemblée générale approuvant le partage en nature et l'attribution des fractions d'immeubles aux associés dans les conditions ci-dessus, le liquidateur ou l’un d ’eux, s’il en a été nommé plusieurs, devra, dans un nouveau délai d'un mois, sommer par acte extrajudiciaire les associés ou leurs ayants droit qui n ’ont pas encore signé, d ’apposer leur signature sur le partage dans un délai de deux mois à compter de ladite sommation.
Si à l’expiration dudit délai, tous les associés n’ont pas signé le partage, le liquidateur le soumet par voie de simple requête à l’homologation du tribunal civil du lieu du siège social statuant en chambre du conseil, le ministère public entendu.
Le tribunal statue en dernier ressort et sa décision n ’est pas susceptible d ’opposition ni d ’appel.
Le liquidateur doit, dans le mois de sa date, taire publier Je dispositif du juge ment dans un journal d’annonces légales du lieu du siège social; cette publication vaut signification du jugement aux associés n’ayant pas adhéré au partage.

 

Article 4ter (créé par l'article 1er de la loi n° 24 du 4 février 1943)

Les sociétés civiles dont l’objet rentre dans les prévisions de l’article 1er pourront, nonobstant toute clause contraire des statuts et quelle que soit la date de leur Constitution, prononcer leur dissolution à la double majorité des deux tiens du capital et du nombre des associés.

 

Chapitre II

(DISPOSITIONS RÉGISSANT LES COPROPRIÉTAIRES D'IMMEUBLES)

 

Article 5

Lorsque les différents étages d ’une maison appartiennent à divers propriétaires, ceux-ci, à défaut de titres contraires, sont présumés être copropriétaires du sol et de toutes les parties du bâtiment qui ne sont pas affectées à l’usage exclusif de l’un d’eux tels que les cours, murs, toiture et gros œuvre des planchers, les escaliers et ascenseurs, la loge du concierge, les passages et corridors, le calorifère et les canalisations de toutes sortes, à l’exception de celles se trouvant à l’intérieur de chaque local. Les coffres, gaines et têtes de cheminées sont aussi propriété commune.
Les cloisons séparatives de deux appartements appartiennent en mitoyenneté aux propriétaires des dits appartements.

 

Article 6

À défaut de convention contraire, chacun des propriétaires, pour la jouissance de sa fraction divise, peut user librement des parties communes, suivant leur destination et sans faire obstacle aux droits des autres propriétaires.
Chacun d’eux est tenu de participer aux charges de la conservation de l’entretient et de l’administration des parties communes.
Dans le silence ou la contradiction des titres, les droits et les charges des parties communes se répartissent proportionnellement aux valeurs respectives des fractions divises de l’immeuble eu égard à leur étendue et à leur situation.

 

Article 7

Dans tous les cas de copropriété d’un immeuble divisé par étage ou par appartement et en l’absence d’un règlement prévoyant une organisation contraire, les différents propriétaires se trouvent obligatoirement et de plein droit groupés dans un syndicat, représentant légal de la collectivité.
Le syndic, agent officiel du syndicat, chargé de le représenter en justice, tant en demandant qu’en défendant, même au besoin contre certains des copropriétaires, est nommé comme il sera dit à l’article 10 ci-après.

 

Article 8

Il est pourvu à la bonne jouissance et administration communes par un règlement de copropriété, objet d’une convention générale ou de l’engagement de chacun des intéressés.
Ce règlement oblige les différents copropriétaires et tous leurs ayants cause.
À l’égard, toutefois, des ayants cause à titre particulier des parties au règlement, celui-ci n’est obligatoire qu’après avoir été transcrit sur les registres du conservateur des hypothèques de l’arrondissement où l’immeuble est situé.
La clause compromissoire est admise dans le règlement de copropriété en vue des difficultés relatives à son application.

 

Article 9

En l’absence d’un règlement de copropriété ou en ce qui concerne les points qu’il n’aurait pas prévus, l’administration des parties communes appartient au syndicat des copropriétaires institué par l’article 7 de la présente loi et dont les décisions seront obligatoirement prises à la majorité des voix de tous les intéressés dûment convoqués, présents ou représenté par un mandataire régulier, chacun d’eux disposant d’un nombre de voix proportionnel à l’importance de ses droits dans l’immeuble.
Le syndicat des copropriétaires statuant à une double majorité comprenant plus de la moitié d’entre eux et les trois quart au moins des voix pourra établir un règlement des copropriétaires ou apporter des additions et modifications au règlement existant, lesquels règlement, additions et modifications seront obligatoires, comme il est dit à l’article précédent, et sous la même condition de transcription.
Les pouvoirs du syndicat, statuant ou non par voie de règlement et à quelque majorité que ce soit, sont limités aux mesures d’application collective concernant exclusivement la jouissance et l’administration des parties communes.
À la majorité des voix, le syndicat pourra imposer toutes assurances collectives relatives aux risques qui menacent l’immeuble ou les copropriétaires dans leur ensemble. Il pourra autoriser, aux frais de ceux des propriétaires qui en feront la demande tous travaux et toutes installations dont il ne pourrait résulter qu’un accroissement de la valeur pour l’ensemble ou quelque partie de l’immeuble et ce, dans les conditions et aux charges d’indemnités ou autres qu’il déterminera dans l’intérêt des copropriétaires.

 

Article 10

Sauf dispositions contraires dans le règlement, un syndic, nommé à la majorité des voix ou, à défaut, sur requête de l’un des copropriétaires, par une ordonnance du président du tribunal Civil, les autres propriétaires entendus ou dûment appelés, sera chargé de l’exécution des décisions de l’assemblée et, au besoin, de pourvoir de sa propre initiative à la conservation, à la garde et à l’entretien en bon de la propreté et de réparations de toutes les parties communes, ainsi que de contraindre chacun des intéressés à l’exécution de ses obligations.
Ses pouvoirs sont révoqués suivant la manière dont il a été nommé, par le syndicat des copropriétaires ou par une ordonnance du président du tribunal civil auxquels les différents propriétaires avertis au préalable pourront faire connaître leur avis.
La rémunération du syndic judiciaire est déterminée par l’ordonnance de nomination.

 

Article 11 (modifiée par l’article 1er du décret-loi du 29 novembre 1939)

Le payement par chacun des copropriétaires de sa part contributive est garantie au profit de la collectivité qui en a fait l’avance par un privilège portant sur la part divise pour celui pour lequel l’avance aura été consentie, ensemble sur sa quote-part indivise des parties communes de l’immeuble.
L’avance consentie sera constaté par un acte dressé en la forme authentique, le débiteur dûment appelé, sur la production du représentant légal ou conventionnel de la collectivité des pièces comptables portant répartition entre les copropriétaires des charges et dépenses de l’immeuble et du procès-verbal de l’assemblée des copropriétaires établissant cette répartition et constatant le montant de la part incombant au copropriétaire défaillant qui a été avancée pour son compte. Une copie de ce procès-verbal, certifié conforme par le représentant de la collectivité, sera annexé à l’acte.
Le privilège immobilier ci-dessus institué sera inscrit sur le registre du conservateur des hypothèques de l’arrondissement où l’immeuble est situé, de la manière indiquée par la loi, en vertu de l’acte authentique visé au paragraphe précédent.
Ce privilège prendra effet à compter de la date de l’acte authentique, à condition d’avoir été inscrit dans les délais de soixante jours, à compter dudit acte.
Il ne pourra être invoqué que pour la contribution à des charges dont la naissance ne sera pas antérieure de plus de cinq années à l’acte authentique.
En outre, le payement de la part contributive due, même à titre d’avance, par chacun des copropriétaires est garantie au profit de la collectivité par un privilège portant sur tous les meubles qui garnissent les lieux, sauf si ces derniers font l’objet d’une location non meublée ; dans ce dernier cas, le privilège sera reporté sur les loyers dus par le locataire.
Ce privilège sera assimilé au privilège prévu par l’article 2102, 1°, du code civil.
Les dispositions des articles 819, 821, 824 et 825 du code de procédure civile seront applicables au recouvrement des créances visées aux deux alinéas précédents.

 

Article 12

En cas de destruction par incendie ou autrement, les copropriétaires seront tenus au point de vue de la reconstruction, et sauf convention contraire, de se conformer à la décision qui sera prise par le syndicat des propriétaires, statuant à la majorité indiquée par l’alinéa premier de l’article 9 de la présente loi.
Dans le cas où le syndicat déciderait la reconstruction, les indemnités représentatives de l’immeuble détruit seraient sous réserve des droits des créanciers inscrits, affectés par privilège à la reconstruction.

 

Article 13

L’article 664 du code civil est abrogé.

 

Article 14

La présente loi est applicable aux départements de la Moselle, du Haut-Rhin et du Bas-Rhin, ainsi qu’à l’Algérie.

Rappels

 

Article 664 du Code civil

Lorsque les différents étages d’une maison appartiennent à divers propriétaires, si les titres de propriété ne règlent pas le mode de réparations et reconstructions, elles doivent être faites ainsi qu’il suit :
Les gros murs et le toit sont à la charge de tous les propriétaires, chacun en proportion de la valeur de l’étage qui lui appartient.
Le propriétaire de chaque étage fait le plancher sur lequel il marche ;
Le propriétaire du premier étage fait l’escalier qui y conduit ; le propriétaire du second étage fait, à partir du premier, l’escalier qui conduit chez lui ; et ainsi de suite.

 

Article 48 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965

Le chapitre II de la loi du 28 juin 1938 tendant à régler le statut de la copropriété des immeubles divisés par appartement est abrogé. L'article 664 du code civil demeure abrogé.

 

Article L.212-17 du Code de la construction et de l’habitation

La loi du 28 juin 1938 tendant à régler le statut de la copropriété des immeubles divisés par appartements est abrogée.
Toutes références au titre Ier de ladite loi sont, en tant que de raison, réputées faites aux dispositions correspondantes des sections précédentes du présent chapitre.

 

Extraits de l'intervention liminaire de M. Jean Foyer, gardes des sceaux (séance du 22 avril 1965 de l'assemblée nationale) lors de la première lecture de la future loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 ( page 817 du J.O.R.F.)

Dans son excellent rapport écrit, M. Zimmermann a rappelé l'origine de cette pratique, sur laquelle l'Assemblée est appelée à délibérer aujourd'hui, de la division des immeubles d'habitation par étages ou par appartements. Il a rappelé comment l'incendie de Rennes de 1720 avait entraîné le développement de cette pratique dans la ville bretonne et comment l'enserrement de Grenoble dans ses anciens remparts avait conduit à construire en hauteur dans cette ville et à diviser les immeubles d'habitation par appartements.
Les rédacteurs du code civil connaissaient déjà cette pratique, puisqu'ils lui avaient consacré un article. Il a fallu attendre la loi du 28 juin 1938 pour que la copropriété reçût un début d'organisation légale, toute la matière étant jusqu'alors abandonnée à la convention des parties.
Les rédacteurs du texte qui devait devenir la loi du 28 juin 1938 et les législateurs qui le votèrent, ne se doutaient probablement pas de l'essor qui serait pris par cette institution. Depuis une vingtaine d'années, elle a acquis une importance pratique de plus en plus considérable, soit qu'elle ait permis aux propriétaires d'immeubles anciens de se libérer du fardeau que sont devenus les vieux appartements dans des immeubles sur lesquels pèse l'infernale législation des loyers dont la France souffre depuis un demi-siècle, soit que — et c'est une perspective plus réjouissante — elle soit devenue dans les agglomération une des formes les plus modernes de l'accession à la propriété.
Ce développement de la copropriété des immeubles divisés par appartements a révélé les lacunes, les imperfections et les insuffisances de la loi de 1938, ce qui se mesure au contentieux qui s'est développé autour de ce texte, car si le développement d'un contentieux important peut s'expliquer par le succès même de l'institution, il n'est jamais par lui-même un signe de santé de l'ordre juridique.

 

1er alinéa de l'article 5 du décret n° 55-559 du 20 mai 1955 (page 5039 du J.O.R.F.)

Les droits de reprise prévus à la présente loi peuvent être exercés par les membres des sociétés mentionnées au chapitre Ier de la loi du 28 juin 1938, sur les logements qui leurs sont attribués en jouissance.

 

Article 80 de la loi n° 53-80 du 7 février 1953 (page 1263 du J.O.R.F.)

Les dispositions de la loi du 28 juin 1938 sont étendues aux sociétés constituées ou à constituer, quelle qu’en soit la forme, ayant pour objet la construction, l’acquisition ou la gestion d’ensembles immobiliers à usage principal d’habitation composés d’immeubles collectifs, de maisons individuelles et, éventuellement, des services communs y afférents et destinés à être attribués aux associés en propriété ou en jouissance.
Les sociétés ayant le même objet, la construction, l’acquisition et fonctionnant dans le cadre de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération peuvent attribuer à leurs associés les immeubles ou fractions d’immeubles soit à titre de reprise ou de remboursement en nature d’apports, soit, pour la partie excédant la valeur de ces apports, par voie de cession.

 

Extraits du rapport fait, au nom de la Commission des Lois constitutionnelles, de Législation, du Suffrage universel, du Règlement et d'Administration générale, sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, par M. Joseph VOYANT, Sénateur ( pages 1 à 10).

Mesdames, Messieurs,
Avant d'aborder l'étude de cet important projet de loi fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis, il semble nécessaire de rappeler brièvement les origines de cette institution.
I. — Historique de la copropriété.
A. — ANCIENNETÉ DE L'INSTITUTION
La copropriété, qui est, en réalité, une division des maisons par appartements entre plusieurs copropriétaires, est fort ancienne, puisque certains historiens, et non des moindres, prétendent la faire remonter à la Rome antique.
Sans aller aussi loin, il est certain que la copropriété était connue dans l'ancien droit français, ainsi qu'en témoignent les coutumes d'Auxerre, de Montargis, du Nivernais, du Bourbonnais, d'Orléans, de Berry et de Bretagne.
Mais la copropriété s'était surtout développée dans deux villes, dans des conditions qui doivent retenir l'attention, car elles ne sont pas sans présenter quelque analogie avec les causes qui déterminent l'essor actuel de la copropriété.
À Nantes, d'abord, un incendie en 1720 détruisit 32 rues, 850 maisons, fit 100 victimes. Cet effroyable sinistre obligea les Nantais à réunir leurs efforts et le reste de leurs capitaux pour participer à l'édification de maisons collectives là où ils n'étaient propriétaires que d'un étage.
À Grenoble, l'essor de la copropriété eut une autre cause : l'enserrement de la ville dans une enceinte fortifiée et l'existence d'un contrat spécifique au Dauphiné, la convention « d'albergement », véritable bail emphytéotique. C'est dans cette dernière ville que les conventions de copropriété furent les mieux étudiées, les plus poussées, à telle enseigne que l'on a justement écrit qu'elles préfiguraient les règlements de copropriété modernes.
Ce n'est donc pas par une rencontre fortuite que la copropriété est venue dans ces deux cas au secours d'une crise du logement, car elle devait jouer ultérieurement — et avec une importance accrue — la même fonction, ce qui démontre l'importance qu'il faut attacher au projet actuel.
La copropriété n'a guère retenu l'attention des rédacteurs du Code civil et il fallut les observations des tribunaux de Lyon et de Grenoble pour que fut inséré dans cet ouvrage l'article 664 aujourd'hui abrogé. Mais le texte était mal venu. Il n'envisageait la copropriété que sous la forme de la contribution des copropriétaires aux charges, et se gardait bien de doter l'institution d'un statut propre à faire triompher l'intérêt collectif sur la résistance de l'un des copropriétaires.
C'est après la première guerre mondiale que la copropriété apparut pour la première fois véritablement comme un remède à une crise aiguë du logement, due à la vétusté des immeubles existants, aux destructions résultant du conflit, à la législation exceptionnelle sur les loyers d'habitation, qui rendait nulle la rentabilité d'un immeuble ancien, à l'élévation considérable enfin du coût de la construction. Rien qu'à Paris, 377 immeubles restaient inachevés, faute de capitaux.
Il parut nécessaire de faire accéder à la propriété toute une catégorie de Français de condition moyenne, incapables sans doute de financer une opération de construction dans son ensemble, mais susceptible d'y contribuer pour partie. Là où l'individu s'avérait impuissant, le groupe devait triompher. De là, la naissance, après la guerre de 1914-1918 , de nombreuses sociétés de construction, surtout dans la région parisienne.
Mais pour que la copropriété put fonctionner, il était nécessaire de lui donner des cadres juridiques stables constituant un statut. Cette tendance se manifesta dès 1922 au Congrès de la Fédération du bâtiment et des travaux publics, à l'instigation de juristes comme MM. Colin et Capitant.
Il fallut, cependant, l'intervention efficace de la Société d'études législatives et celle de différents groupements immobiliers, pour que vît enfin le jour le 13 janvier 1933 une proposition de loi déposée par le député Cautru. Cette dernière, examinée par le Parlement, fut finalement votée le 10 juin 1938 et devint ainsi une loi promulguée le 28 juin suivant.
B. — LA LOI DU 28 JUIN 1938
Outre des innovations concernant les sociétés de construction, dont la validité était mise en doute sous prétexte qu'elles ne poursuivaient pas le but lucratif prévu par l’article 1832 du Code civil, la loi du 28 juin 1938 instituait, pour la première fois en France, un statut de la copropriété comportant une organisation véritable de l'institution.
Elle reposait sur quatre éléments essentiels :
D'abord, une charte commune : le règlement de copropriété, obligatoire pour les copropriétaires et leurs ayants droit, même à titre particulier, à condition que la transcription en ait été effectuée.
Ensuite, un syndicat des copropriétaires, expression empruntée à la pratique grenobloise. Ce groupement d'une nature originale réunissait obligatoirement et de plein droit — à défaut de convention comportant une organisation contraire — tous les copropriétaires. Il tenait des assemblées, au cours desquelles s'exerçait, à la majorité, le pouvoir d'administration, comme le pouvoir réglementaire de la copropriété. La loi ne l'avait pas expressément doté de la personnalité morale. Mais la doctrine et la jurisprudence, à quelques exceptions près, s'accordaient à la lui reconnaître.
Encore, un syndic qualifié d' « agent officiel » du syndicat était chargé d'exercer en permanence le rôle de pouvoir exécutif de la copropriété et investi dans ce but d'un certain pouvoir d'initiative, d'ailleurs limité.
Enfin, le législateur de 1938 avait conféré au syndicat des copropriétaires des garanties mobilières et immobilières destinées à éviter qu'un copropriétaire ne pût impunément se soustraire au paiement de sa part de charges communes.
Le texte de 1938 était clair et concis, malgré quelques lacunes. En fait, il n'a été que peu modifié. Citons pour mémoire : le décret-loi du 29 novembre 1939, qui a précisé le rang du privilège immobilier du syndicat ; la loi du 20 février 1943 et les décrets n° 55-22 du 4 janvier 1955, 55-559 (article 5 page 5039 du J.O.R.F.) et 55-563  (pages 5044 à 5046 du J.O.R.F.) du 20 mai 1955 relatifs aux sociétés de construction, l'ordonnance et les deux décrets du 7 janvier 1959 pris en application des textes sur la publicité foncière et qui ont remplacé dans l'article 11, le mot « privilège » par ceux « d'hypothèque légale ».
Comment se caractérisait le statut de 1938 ?
D'abord, et c'est là l'essentiel, il avait un caractère supplétif. La loi de 1938 proposait aux copropriétaires un statut cohérent. Mais ils étaient libres de l'écarter, en organisant la copropriété sur d'autres bases, par exemple, celle d'une société de gestion, à la condition toutefois que le système adopté fût propre à triompher des résistances individuelles.
Par ailleurs, les travaux préparatoires et notamment le rapport de M. Cautru avaient fait ressortir le désir certain du législateur de sauvegarder, dans toute la mesure du possible, les droits individuels au sein d'une organisation communautaire. La jurisprudence devait par la suite s'en inspirer pour déterminer restrictivement les pouvoirs des assemblées générales.
C. - ÉVOLUTION DE LA COPROPRIÉTÉ
La loi de 1938 a, dans son ensemble, fort bien répondu à ce qu'on attendait d'elle, malgré son laconisme peut-être parfois excessif. Mais dans un monde sans cesse en marche, avide de progrès, et soumis à une technique de plus en plus évoluée, notamment dans le domaine de la construction, quelle législation pourrait rester immuable ?
Les législateurs de 1938 — et ils s'étaient pourtant montrés révolutionnaires — avaient conçu la copropriété à l'échelle grenobloise. Le statut qu'ils avaient élaboré était et serait encore sans doute valable pour des immeubles de moyenne importance, divisés entre un petit nombre de copropriétaires se connaissant bien, et capables de résoudre ensemble leurs problèmes, sans recourir à l'intervention des tribunaux.
Mais depuis la loi du 21 juillet 1950 instituant les premières mesures d'aide à la construction, un phénomène nouveau s'est produit : la création des ensembles immobiliers expressément prévue par l'article 80 de la loi du 7 février 1953 (page 1263 du J.O.R.F.). À la copropriété ancienne dite communément « verticale » s'est ajouté une forme nouvelle de beaucoup plus importante : la copropriété dite « horizontale ».
On a vu s'élever aux abords des grandes cités, à un rythme rapide, encore qu'insuffisant, des groupes d'habitations composés de plusieurs bâtiments ou corps de bâtiment et divisés en milliers de lots. Cette forme nouvelle et véritablement collective de propriété immobilière a provoqué la curiosité des sociologues qui, au cours de colloques tenus à l'Unesco, ont envisagé sous leurs divers aspects les problèmes sociaux, humains et même moraux soulevés par la copropriété horizontale.
À leur tour, les juristes se sont penchés sur la question. On n'administre pas une cité comme un immeuble. Dans les grands ensembles, en raison de la multiplicité des copropriétaires, se forment parfois des coalitions d'intérêts opposés, impropres à faciliter la gestion. Les syndics professionnels eux-mêmes, malgré leurs mérites ont eu quelque peine à s'habituer à l'administration de groupes d'un tel volume, ce qui les a contraints à une réorganisation des structures juridiques et comptables de leurs cabinets.
D. — CRITIQUES FORMULÉES CONTRE LA LOI DE 1938
De là à penser que la loi du 28 juin 1938 était périmée, il n'y avait qu'un pas à franchir. Peut-être eut-on pu songer à légiférer spécialement pour les grands ensembles, qui ont, dans le domaine de la copropriété, un caractère propre ? Peut-être eut-il été préférable de les soumettre à une organisation particulière adaptée à leur masse même ? On a préféré mettre en cause en sa totalité la loi du 28 juin 1938. Que lui reprochent ses détracteurs ?
Les critiques formulées contre elle ont été exposées notamment dans un congrès tenu à Caen en 1960 par les administrateurs de biens, syndics de copropriété. Elles sont les suivantes, partiellement reproduites d'ailleurs, dans l'exposé des motifs de la proposition de loi.
D'abord, le système de la loi de 1938 ne permet pas une administration progressive de la copropriété. Les tribunaux interprétant strictement les termes de l'article 9 de cette législation, ont, en effet, décidé que tout embellissement nouveau ne pouvait être voté qu'à l'unanimité des copropriétaires. Or, en pratique — et spécialement dans les grands ensembles — cette unanimité est impossible à réunir. Il suffit d'un abus de minorité pour paralyser toute initiative, même souhaitée par la quasi-totalité des copropriétaires et bénéfique pour l'immeuble. De ce fait, la copropriété risque, au lieu d'être un facteur de progrès, de devenir un instrument de routine.
Ensuite, le syndic manque d'autorité, d'abord parce que sa situation juridique vis-à-vis de la copropriété est insuffisamment précisée par le texte. D'autre part, ce dernier prévoit sa nomination et sa révocation à l'insuffisante majorité des voix présentes ou représentées à une assemblée générale. Il en résulte que le syndic court le risque d'une révocation sans raison valable et ne peut, de ce fait, assurer d'une façon stable ses fonctions. Il ne dispose pas davantage de l'ascendant nécessaire pour suggérer aux copropriétaires les solutions susceptibles de résoudre les difficultés dans lesquelles ils se débattent, trop souvent il faut bien le dire, faute d'avoir été suffisamment préparés à leur rôle nouveau, aux responsabilités qui en découlent, et d' avoir pris conscience de la solidarité qui doit exister entre eux.
Le fonctionnement des copropriétés est en outre paralysé par le problème des charges impayées. Trop de copropriétaires, par mauvaise volonté, négligence, ou quelquefois impécuniosité, ne s'acquittent pas de leurs dettes en temps voulu. Or, les syndics ne peuvent impunément — surtout dans les grands ensembles immobiliers — se faire les banquiers de la copropriété. Pourtant, les garanties de recouvrement instituées par la loi du 28 juin 1938 se sont, à l'expérience, avérées d'un maniement trop lourd, notamment l'hypothèque légale entourée par le législateur d'un excessif formalisme. De là, l'idée de nombreux praticiens d'alléger les procédures en matière de copropriété.
Enfin, pour les spécialistes, la clause compromissoire ou d'arbitrage paraît condamnée. Les auteurs de la loi de 1938 avaient fondé sur elle les plus grands espoirs. Ils ont été déçus. Sur ce point, la rédaction de l'article 8 de la loi du 28 juin 1938 était défectueuse. À la prendre à la lettre, on eut pu songer à confier à des arbitres le soin de trancher de problèmes de propriété. Les tribunaux se sont élevés contre une telle interprétation. Pratiquement, ils ont réduit à une peau de chagrin la compétence de la juridiction arbitrale. Cette attitude leur a été facilitée par la répugnance des copropriétaires à faire confiance aux arbitres et leur désir d'être jugés par les tribunaux de droit commun. Dans ces conditions, à quoi bon maintenir l'arbitrage qui, au lieu d'éviter des difficultés, provoque de nouveaux litiges ?
II. — Le projet de loi fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis.
C'est à ces préoccupations, d'ailleurs dans l'ensemble légitimes, que répond le projet de loi présenté par le Gouvernement, voté par l'Assemblée Nationale à sa séance du 22 avril 1965 et transmis au Sénat.
A — NÉCESSITÉ DE FORMULER EN MATIÈRE DE COPROPRIÉTÉ DES DÉFINITIONS CLAIRES ET PRÉCISES
La copropriété est une situation juridique complexe, puisque dans un immeuble divisé il existe deux catégories de droits : les droits privatifs sur chaque lot, les droits indivis sur les parties communes, ces deux droits étant soudés en un seul : le droit de copropriété.
Au souci d'une précision juridique répond pour sa plus grande partie le chapitre I du projet intitulé « Définition et organisation de la copropriété ». Effectivement, le texte proposé est plus explicite que celui de 1938, puisqu'après avoir, dans ses articles 2 à 4, spécifié ce que l'on doit entendre par propriété privative et propriété indivise, il détermine les attributs qui y sont attachés. Le projet a, en outre, le mérite de mettre en lumière la notion juridique du « lot » préférable aux termes incertains « d'étages ou appartements ».
Ceci dit, quelques observations s'imposent.
1° Les grands ensembles.
Aux termes de l'article premier (alinéa 2), la loi s'applique « à défaut de convention contraire créant une organisation différente... aux ensembles immobiliers... ». Sous réserve de cette part laissée à la liberté contractuelle, on peut légitimement se demander si les dispositions du projet sont parfaitement propres à assurer la gestion des grands ensembles. La création de syndicats secondaires de bâtiment est certes un palliatif, mais un palliatif insuffisant.
N'est-ce pas implicitement ce que reconnaissait M. Zimmermann, lorsqu'il écrivait dans son rapport : « Le projet, bien qu'il déclare le statut applicable aux ensembles immobiliers, dont il donne une définition plus précise, n'apporte, à première vue, pas d'innovation fondamentale pour aider à résoudre ces problèmes ». Il ajoutait, il est vrai : « Il ne s'agit, cependant, que d'une apparente omission ».
Cependant, le projet n'est pas absolument convaincant et le rapporteur, devant l'Assemblée Nationale, admettait lui-même « qu'un avenir prochain contraindra sans doute le législateur à donner aux grands ensembles un statut particulier, qui débordera vraisemblablement le domaine du droit privé ». Sous cet angle, on peut, encore une fois, se poser la question de savoir s'il n'eût pas été plus opportun d'envisager d'ores et déjà une réforme profonde du statut des grands ensembles. Pourquoi légiférer aujourd'hui pour légiférer à nouveau demain ? La législation a, elle aussi, besoin d'un minimum de stabilité* On ne saurait rester passif devant l'existence de plus en plus fréquente d'ensembles immobiliers où coexistent 5.000 ou 8.000 copropriétaires. Comment administrer de tels groupes selon les formes classiques et, notamment, y maintenir dans toute sa pureté originaire le régime des assemblées de copropriété ? On risque, d'abord, de se heurter à des obstacles matériels, notamment à celui de convoquer des milliers de personnes ou encore de trouver des salles suffisamment vastes pour les réunir toutes. Mais la difficulté majeure est celle de faire correctement fonctionner la loi majoritaire dans de tels groupements.
Dans quel sens aurait-on pu tenter de trouver une solution à ce problème délicat en l'état actuel de notre droit privé ? Probablement dans la création de syndicats secondaires, solution aperçue par les auteurs du projet, mais qu'ils n'ont ni traitée avec toute la rigueur nécessaire ni approfondie. Dans un système plus cohérent, l'existence de syndicats secondaires pourrait être rendue obligatoire dès la mise en copropriété, lorsqu'un immeuble comporte plusieurs bâtiments, divisés eux-mêmes en un certain nombre de lots principaux : cinquante, par exemple.
Ce syndicat secondaire serait doté obligatoirement d'un conseil syndical. Les copropriétaires de chaque bâtiment seraient représentés obligatoirement aux assemblées du syndicat principal par ce conseil syndical. L'assemblée générale du syndicat principal se composerait ainsi seulement de membres des conseils syndicaux des divers bâtiments qui disposeraient d'un nombre de voix proportionnelles à celles affectées par le règlement de copropriété à chaque bâtiment.
C'est là, en l'état actuel du projet une vue très générale et futuriste. Un problème complexe, de par sa nature même, nécessiterait à lui seul une étude approfondie, à laquelle il est actuellement trop tard pour se livrer. L'urbanisme aurait, à son tour, son mot à dire dans une telle entreprise et il serait souhaitable que le plan de masse fut, à l'origine, conçu de telle sorte que la division du sol fut toujours possible afin de permettre la création de nouvelles copropriétés de plus faible envergure.
….

 Conclusions

 

La loi du 28 juin 1938 : L'article 5 reprenait la totalité de l'article 664 du Code civil et « améliorait » ce dernier.

 

La loi du 10 juillet 1965 : Elle n'est pas plus adaptée que celle du 28 juin 1938 concernant la « copropriété horizontale » qui serait soit un groupe d'immeubles bâtis (premier alinéa, ou I actuel, ou second alinéa ou II actuel) en confondant ou mélangeant bâtiments collectifs et groupes de maisons individuelles que sont les lotissements.

 

Constatations  : Il découle, de ce qui précède et des rapports de M. ZIMMERMANN et M. VOYANT, que le second alinéa de l'article 1er (II actuel) de la loi du 10 juillet 1965 serait ambigu et aurait été, pour le moins, bâclé.

 

Tentatives pour y remédier : Le législateur a créé, via le Code de l'urbanisme, les Associations Foncières Urbaines, AFULibres en particulier, qui « mélangent », à l'intérieur de leurs périmètres, des lots « fonciers » sur lesquels sont édifiés des bâtiments ou groupe de bâtiments collectifs et des lots « fonciers » sur lesquels sont édifiées des constructions telle une maison individuelle.



13/02/2023
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